Une grande fête dédiée à l’automobile et à la vitesse qui a été remportée par Most. Ensuite, le circuit est devenu plus grand et attirait de grands noms. Cette première formule fut gagnée par Edouard Meyer en 1925, 1926 et 1927, en version internationale.
Mais il faudra attendre l’année 1929 pour que ce circuit marocain prenne une nouvelle tournure et s’installe dans la durée avec une vision plus professionnelle et plus ouverte sur le monde d’entre-deux-guerres. D’ailleurs, pour donner la chance à tous les grands pilotes de participer, les deux premières éditions du rallye ont été espacées de cinq ans, d’abord en 1929 puis en1934. Toujours organisé au mois de mai, la rallye aura plusieurs éditions et vivra jusqu’en 1988.
On y a vu de belles courses et surtout l’évolution de l’automobile, du début du siècle dernier à la fin des années 80, avec de nouveaux styles, de nouveaux modèles et des constructeurs toujours plus innovants. Ce qui fait dire à l’un des journalistes allemands de l’époque que le rallye du Maroc était un grand laboratoire pour les grandes firmes et pour les ingénieurs qui rivalisaient d’ingéniosité pour mettre de belles voitures sur le circuit.
Sans oublier que c’était là également un test grandeur nature pour les constructeurs parce que c’était un rallye réputé pour ses difficultés de terrain, un circuit exigeant, très retors, avec de véritables pièges pour les manœuvres des pilotes qui s’accordaient tous à dire que le rallye du Maroc est un casse-tête pour les plus forts d’entre eux et les plus expérimentés, comme l’avait dit Édouard Meyer, l’un des premiers vainqueurs à Casablanca.
Si les premières éditions étaient plus concentrées, à partir des années 30, le rallye du Maroc est disputé sur une distance de 5 000 kilomètres. Cette distance considérable est parcourue, en moyenne en sept étapes. Il faut savoir que toutes les liaisons étaient très longues dépassant souvent les 800 kilomètres. Ce qui était très éprouvant et très dur pour de nombreux pilotes qui ont abandonné en cours de route. Il faut aussi préciser ici une autre exigence de la part des organisateurs qui obligeaient les pilotes à tenir des vitesses moyennes élevées, quelque 90 kilomètres/heure par routes difficiles, par des passages nivelés et autres routes détrempées. Ce qui fait dire à Robert La Caze, un des grands noms du circuit du Maroc, que finir ce rallye est déjà une victoire en soi tant les manœuvres sont dures et les routes très tortueuses et piégeuses. Pour les organisateurs, ces difficultés étaient nécessaires pour attirer à chaque édition de nouveaux pilotes séduits par la réputation de l’une des courses par étapes les plus corsées au monde. Ce qui était le cas puisque de nombreux champions ont fait du Maroc un passage obligé pour asseoir leur réputation et se faire les dents pour gagner d’autres rallyes tous aussi durs les uns que les autres.
Il faut aussi dire qu’en l’espace de quelques années, le circuit du Maroc est devenu l’un des plus attirants au monde. La crème des courses automobiles s’y bousculait avec grand renfort de stars de la chanson, du cinéma, de la télévision et du monde politique, tous attirés par le spectacle qu’offrait le rallye du Maroc. Ce qui fait que trente ans plus tard, en 1969, seuls 7 véhicules terminèrent encore la course sur les 68 inscrits. C’est dire qu’à chaque édition, les difficultés étaient plus importantes et le circuit plus exigeant pour tous ceux qui le découvraient pour la première fois en faisant leur baptême de feu en terre marocaine. Cette belle réputation finira par inscrire Le Rallye du Maroc au Championnat du monde des rallyes en 1973, 1975 et 1976. Il a aussi fait les beaux jours du Championnat international des marques en 1971 et 1972. Une consécration pour cette course marocaine déjà vieille de plus de 50 ans avec de beaux palmarès et de beaux champions qui y ont inscrit leurs noms pour l’histoire. Cette présence au niveau mondial se déroulait avec des épreuves spéciales toutes de longueur très variable, pouvant même atteindre parfois plusieurs centaines de kilomètres. Le maître mot étant de mettre les pilotes à dure épreuve et de les pousser dans leurs derniers retranchements. Durant les trois années en WRC, la course démarrait de la capitale du Royaume, Rabat. Tout un symbole. Elle comptait une dizaine d’épreuves spéciales, comme celles considérées comme les plus dures de la zone de Bin el Ouidane ou du col du Tizi n’Test. Sans oublier d’autres étapes difficiles considérées comme les plus longues ayant été positionnées avant-dernières aux programmes, et dites Transmarocaines, qui reliaient Fès à Agadir en 1975 (786 kilomètres, remportée par Timo Makinen en 7 heures 50 minutes sur Peugeot 504), et 1976 (776 kilomètres, gagnée par Simo Lampinen, en 9 heures 41 minutes également sur Peugeot 504. L’arrivée finale et le sacre étaient célébrés à Casablanca ou à Marrakech.
Jean Deschazeaux remporta deux fois cette compétition, à 16 ans d’écart. Robert La Caze aussi, mais à 13 ans d’intervalle. Jean-Pierre Nicolas en fut le seul triple vainqueur (1968, 1974 et 1976), le constructeur Renault en étant (avec Alpine pour moitié) quadruple lauréat. C’est dire que les constructeurs français rivalisaient d’ingéniosité pour marquer cette prestigieuse course à leur palmarès. Un défi de taille pour les autres constructeurs qui se risquaient sur un terrain alors dédié aux plus vaillants des pilotes.
Au fil de l’histoire, ce rallye a fini par devenir l’un des plus grands événements sportifs en Afrique et dans le monde arabe. Il a marqué les esprits et surtout a fait émerger de nombreux pilotes marocains qui n’ont pas gagné le circuit mais qui se sont frottés à l’une des courses les plus dures au monde avant de disparaître en 1988, laissant derrière elle un véritable vide après plus de 70 ans d’histoire.